« Quand on me dit que ma fille est handicapée, ça fait mal »

5 min pour découvrir comment Fabienne a vécu la relation de sa fille avec son frère

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Fabienne* est une enseignante de 55 ans. Elle a 2 enfants, dont la plus jeune, Jeanne* 20 ans, est dyslexique. Mais son grand frère n’a aucune difficulté.

Elle a accepté de nous donner son retour d’expérience sur la relation de Jeanne avec son grand frère.

*L’histoire est réelle mais les prénoms ont été modifiés.

Je m’en suis rendu compte quand Jeanne était en CE1.

Elle est venue en classe et est passée au tableau pour une dictée.

Elle devait écrire le mot jambon, elle l’a écrit « janpon ».

Comme j’avais déjà eu des dyslexiques dans ma classe, je savais qu’ils confondaient souvent les lettres, notamment le b et le p.

On m’a dit que ça passera, mais j’ai préféré prendre rendez-vous avec un orthophoniste.

Elle était bien dyslexique.

Et à la suite d’un test qu’on a fait en 4e, elle est aussi dysorthographique.

Je ne l’ai pas bien vécue.

Quand on me dit que ma fille est handicapée, ça fait mal.

On se dit qu’elle va se traîner ça toute sa vie.

Je n’étais pas bien pendant quelques semaines.

Et puis je n’y connaissais rien, je pensais que l’orthophoniste allait s’occuper de tout et régler le problème.

Voir qu’on a un enfant avec des difficultés et qu’on ne peut rien faire pour l’aider, on se sent mal.

Comme je connaissais ses difficultés, j’étais moins exigeante avec Jeanne qu’avec son frère.

Mais avant de savoir qu’elle était dyslexique, je la traitais comme mon fils, malgré ses difficultés de lecture.

Un jour, je voulais lui faire lire « vendredi ». Elle n’y arrivait pas alors je lui ai dit que c’était un jour de la semaine, et je lui ai fait décomposer le mot.

Elle a bien lu les syllabes, mais arriver à la fin, elle a lu « dimanche ». 

Sur le coup, je me suis énervée. Je n’ai pas été sympa avec elle, mais je ne savais pas à cette époque.

Par rapport à son frère, c’était dur pour elle de voir qu’il se débrouillait très bien.

Elle se comparait sans cesse, elle disait qu’elle était nulle.

Mais quand mon fils est arrivé au lycée, ses notes ont baissé. Je n’étais pas contente, mais ça a rassuré Jeanne de voir qu’il n’était pas intouchable ! 😛

En plus, l’école ne sait pas gérer la dyslexie.

Les professeurs disaient qu’ils mettraient en place des aides, qu’ils allaient faire du concret, mais ils n’ont rien fait.

Alors, chaque début d’année du collège, j’allais voir chaque professeur pour bien leur rappeler que Jeanne était dyslexique.

Et certains me demandaient des conseils car ils ne savaient pas comment faire.

Moi-même en tant qu’enseignante, j’ai juste eu une heure de formation qui ne m’a pas du tout aidée.

Je me rappelle une dictée qu’elle avait faite. Elle faisait beaucoup de fautes et elle avait eu -18/20. C’est inadmissible de traiter un enfant comme ça, surtout quand il a des difficultés.

Je pense qu’on s’est moqué d’elle à l’école. Elle ne me l’a jamais dit, mais je sais qu’il y a des enfants qui ne l’aimaient pas et elle ne voulait pas que je parle de sa dyslexie à ses professeurs. Je pense que c’était par peur des moqueries.

C’était aussi parce qu’elle ne voulait pas sentir différente. Même à la maison, il ne fallait pas en parler.

Mais quand elle a changé de collège, elle m’a remerciée de l’avoir fait. Ses professeurs l’aidaient concrètement, ils prenaient en compte sa dyslexie.

Elle était comme un poisson dans l’eau.

Les profs qui ne prennent pas en compte la dyslexie, ça rend furieux.

Pour l’aider, en primaire je lisais ses cours avec elle. Jeanne étant très visuelle, nous faisions des cartes mentales et elle s’est mise à faire des fiches dès le CM1.

J’essayais moi-même de lui trouver des moyens mnémotechniques pour retenir ce qui lui posait des problèmes.

A partir du lycée, je lui ai acheté des livres audios. Elle ne faisait plus que ça pour lire ses livres en français.

Quand j’étais trop occupée, je l’envoyais parfois voir son frère.

Mais c’était une erreur car il perd vite patience, alors quand il lui expliquait pour la troisième fois, mais qu’elle ne comprenait toujours pas, ça l’énervait.

Ça lui ait déjà arrivé de pleurer à cause de ça…

Quand j’étais trop occupée, je l’envoyais parfois voir son frère.

Mais c’était une erreur car il perd vite patience, alors quand il lui expliquait pour la troisième fois, mais qu’elle ne comprenait toujours pas, ça l’énervait.

Ça lui ait déjà arrivé de pleurer à cause de ça…

Je regrette de ne pas lui avoir fait un test Wisc (test de Q.I pour les enfants et adolescents) plus tôt.

Je ne doutais pas de ses capacités, mais au lycée, j’ai voulu vérifier. Et elle a explosé la baraque !

Elle a une mémoire supérieure à 90% des Français, ça lui a redonné espoir.

Ensuite elle a décidé d’aller en médecine mais je pensais honnêtement qu’elle n’aurait aucune chance.

Mon fils a déjà tenté, il a raté, alors quand elle voulait le faire, je l’ai trouvée très courageuse.

On ne s’en rend pas compte, mais un dyslexique doit bosser deux fois plus dur pour avoir le niveau des autres. Finalement, la médecine se passe plutôt bien.

C’est elle qui a fini par aider son frère !

Aujourd’hui si je devais donner quelques conseils…

D’abord, il ne faut pas s’énerver quand l’enfant a des problèmes pour lire. On se demande si c’est de la fainéantise.

Si l’enfant a un grand frère ou une grande sœur qui n’a pas de problèmes, il ne faut pas les comparer et éviter de les faire travailler ensemble. Surtout si, comme dans mon cas, le grand est impatient.

Ensuite, il faut être à l’écoute. Et selon l’enfant, faire un test Wisc. Voir que l’enfant n’est pas différent, ça le libère. Ça lui redonne la sensation d’être comme les autres.

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